Les Français ont peur du risque. C’est un fait, bien connu de tous, c’est dans notre culture, dans notre histoire. La France a toujours été un pays centralisateur, où l’état providence joue à plein, et les Français attendent de l’état qu’il réponde à tous leurs problèmes.
C’est pour cela qu’en France, on place ses économies sur un livret A, un PEL, une assurance vie avec un fonds en euros à capital garanti. Aucun risque. Le risque c’est le mal. La sécurité avant tout !
L’héritage culturel
Du fait de notre histoire, la tradition catholique a toujours présenté comme une mauvaise chose le fait de gagner de l’argent et de s’enrichir, habitudes qui sont rentrées dans les mœurs, à tel point qu’aujourd’hui encore, il ne fait pas bon afficher sa réussite.
Dans un pays très centralisé, chacun attends de l’état la solution à ses malheurs: chômage, retraite, mauvaise récoltes, augmentations de salaire, habitations à loyer modéré (les fameux HLM), etc.
Une des raisons qui a contribué fortement à éloigner l’épargne des Français de la bourse, c’est notre système de retraite par répartition. La retraite par répartition, c’est simple: les jeunes actifs qui travaillent payent des cotisations, qui sont immédiatement redistribuées sous formes de pensions de retraites aux retraités actuels.
Ce système fonctionnait bien à sa création, après la 2e guerre mondiale, quand il y avait beaucoup de jeunes actifs qui cotisaient (les fameux baby-boomers), et peu de retraités, d’autant plus que l’espérance de vie était beaucoup plus réduite, et les retraités ne percevaient donc leur pensions que pendant quelques années.
Il n’y avait pas besoin d’être un bien grand savant pour se rendre compte que la pyramide des âges allait bien finir par s’inverser 60 ans plus tard, et qu’à partir de 2005/2010, on assisterait à un bouleversement:
- un nombre important de baby-boomers arrivant à la retraite
- une durée de vie qui s’est considérablement allongée, certains retraités cotisant 40 ans et touchant une pension pendant plus de 20 ans
- une transition démographique normale dans tous les pays développés, qui fait que la natalité baisse, et le nombre d’actifs qui cotisent diminuent
- un chômage de masse, apparu dans les années 1990, qui réduit encore le nombre d’actifs cotisant pour les retraites.
Face à ce problème, les différents gouvernements, pendant plus de 30 ans, n’ont jamais réussi à vraiment réformer le système de retraites, devant l’opposition populaire, se contentant de mesurettes au rabais, et cédant systématiquement à la pression de la rue, certains ministres en faisant les frais au passage.
Dans les pays anglo-saxons, qui sont bien plus pragmatiques que chez nous, la confrontation au même problème a engendré une réponse différente: la mise en place de retraites par capitalisation. Un gros mot en France.
Pourtant, le système est intéressant: ici, chaque actif cotise, mais ses cotisations sont versées dans un fonds de pension, qui place cet argent en bourse pour le faire fructifier. Et à son départ à la retraite, c’est l’argent qu’il aura cotisé tout au long de sa carrière, et qui aura fructifié, qui lui sera versé sous forme de rente chaque mois.
Et à long terme (on parle d’une carrière d’au moins 40 ans), la bourse est de loin le placement le plus rentable ! A titre d’exemple, entre 1995 et 2019, le Nasdaq 100 a augmenté de 1875% ! oui vous avez bien lu, 1875 % en 24 ans !!!
On résous ainsi le problème: chaque futur retraité a cotisé toute sa carrière, et a donc forcément une retraite. Il faut cependant une gestion saine des fonds de pensions, et un système social complémentaire pour aider les personnes qui ont eu des parcours difficiles, ce qui n’existe pas trop dans les pays anglo-saxons. Personne n’est parfait.
Ainsi, les anglo-saxons, et particulièrement les américains, ont été sensibilisés très tôt à l’intérêt de la bourse, et aux marchés financiers, qui permettent de faire fructifier l’épargne du foyer. Les américains sont donc très au fait de l’évolution des marchés et indices boursiers, et investissent depuis longtemps, à la fois dans les fonds de pension et à titre individuel.
En France, l’investissement boursier est resté cantonné à une élite, bien informée et conseillée, au fait des meilleurs placements financiers, alors que le reste de la population, rassurée par la confiance absolue en l’état providence, est passée à coté.
La peur du risque
C’est vrai, l’investissement boursier comporte une part de risque, car le prix des actions va varier à la hausse comme à la baisse. Pour autant, avec un peu de méthode et de bon sens, on peut énormément limiter ce risque.
Tout d’abord, l’investissement boursier, pour être rentable et peu risqué, doit s’envisager à long terme: au moins plusieurs année. Ne tentez pas des « coups » sur quelques heures ou quelques jours, ce type d’investissement est très risqué, et à réserver aux traders professionnels ou aux amateurs chevronnés et disposant d’un compte de bourse bien rempli.
Le risque, dès lors qu’on investi à très long terme, soit par exemple sur 40 ans de vis professionnelle, est minime. En effet, la bourse monte toujours à long terme. Même en cas de krach boursier, la crise dure 1 ou 2 ans, et les indices sont ensuite remontés au niveau d’avant crise (même si la crise dans l’économie réelle est plus longue à passer). Ce fut le cas lors de l’explosion de la bulle internet des années 2000, et de la crise des subprimes de 2008.
Un moyen supplémentaire de réduire le risque, c’est de diversifier son portefeuille:
- des secteurs d’activité différents: technologies, aéronautique, industrie, biotechnologies, automobile, construction, retail, foncières, etc
- des secteurs géographiques différents: Europe, US, Pays émergents, etc
On le voit, le risque est en fait largement surestimé: pour un novice qui spécule à court terme, le risque est important, mais pour un investisseur à long terme avec un portefeuille bien diversifié, le risque est très faible.
La fiscalité longtemps dissuasive
L’investissement boursier ayant longtemps été réservé aux riches, à une élite, gentiment détestée par le commun des mortels, la fiscalité a longtemps été dissuasive sur les revenus des capitaux, par idéologie, et dans une optique populiste électoraliste.
Il aura fallu attendre la Flat Tax en 2018, qui réunit en un seul impôt l’impôt sur le revenu et la CSG/CRDS, pour un taux global de 30%, pour enfin donner une visibilité claire sur la fiscalité des placements boursiers. (On peut même descendre bien en dessous en utilisant un PEA pour les actions européennes). Avant, la fiscalité basée sur le barème de l’impôt sur le revenu était dissuasive, surtout pour les hauts revenus, et peu claire et compliquée à calculer.
On voit donc que bien des obstacles ont éloigné l’épargne populaire des français de la bourse, alors même qu’il s’agit du placement le plus rentable à long terme.
Mais tout cela devrait changer, devant la faillite annoncée et prévisible du système de retraite par répartition, et les nouvelles initiatives de l’état comme le tout nouveau PER (Plan Epargne Retraite), la réforme du PEA dans la loi Pacte, et les privatisations comme celle de la Française des Jeux, sensée redonner gout à l’actionnariat populaire.